| novembre 30, 2006 |
| Valse hésitation |
J’ai cette mémoire mamouthesque, cette mémoire que je traîne derrière moi comme une longue litanie de boulets. Mémoire des visages, mémoires des mots, mémoires des instants, mémoires des émotions, mémoire des regards, mémoire des lieux, mémoire des époques. Mémoire des noms, moins. Mais tous les autres, ils sont là en moi, tous les jours, toutes les nuits. Ce sont mes fantômes, ma cohorte de meilleurs ennemis. Dans le meilleur des cas, nous cohabitons dans l’indifférence rancunière. Dans les pires… Bah, dans les pires nous nous affrontons, voir trois ans et demi d’archives… Oserais-je rappeler qu’en une lointaine époque, j’ai traîné mes fonds de jeans à l’UFR d’Histoire de Paris VII….
A cette mémoire s’accole la fièvre de l’archiviste tendance conservatrice. Tout objet, aussi anodin soit-il, possède son histoire propre. Son origine, ses utilisations, son époque. Les livres, les tickets de tout et rien, les petits mots, les vêtements, les ustensiles et autres dispositifs. Ainsi, trier et jeter est un calvaire personnel, un chemin de croix sans fin, exécuté avec la rage du désespoir, tambour battant et mords aux dents. Le courage des lâches ne m’ayant pas épargné, il m’ait de ce fait souvent parfois arrivé de mettre à la benne, avant de m’enfuir comme une voleuse, certains cartons obstinément clos depuis des décennies pour cause de peur de gros coups au cœur et de fondage sur place. Bref.
Enfin, je suis aussi une obsédée des symboles et autres signes : coïncidences, déjà-vus, clins d’œil, occurrences et autres concours de circonstances se font échos les uns aux autres, en s’amplifiant et en balayant tout sur leur passage. Et quand je me m’égare dans ce genre de boucles vicieuses, quand je pars en vrille, quand d’un seul coup je n’arrive plus à faire fonctionner ma rationalité et à « prendre de la distance » comme on dit, eh bien… Parfois, je vais voir Chantal. Mais là aussi, bref.
Reste un dernier aspect.
L’errance.
Ce sentiment de n’appartenir nulle part, de venir de rien et de retourner à encore moins, sans même parler de tendre vers un demain que je ne vois même pas au bout de mes cils. L’errance, toujours, le transit. Le doute. Toujours prête à partir, toujours dans les préparatifs du repli, toujours dans l’expectative de devoir tout quitter et très vite, toujours dans l’angoisse du couperet. SDF dans l’âme, seule dans les foules, terrifiée de l’inconstance et de l’irrationnel, errante professionnelle…
En fait, tout ça pour évoquer des clefs. Des bêtes clefs en alliages divers, des clefs dont la fonction n’est autre que de se glisser dans les serrures adéquates pour donner accès à des lieux. Ces clefs, je les possède encore toutes. Toutes mes étapes, tous ces lieux de pause entre deux errances. 6 trousseaux de clefs correspondants à des serrures ouvrant des portes de lieux auxquels je n’ai plus légalement accès depuis, pffff… Tous les endroits où, pour plus ou moins longtemps, il y a eu une chambre calme bleue et blanche abritant à quart-temps, à mi-temps, à plein temps quelques errances et beaucoup de divagations. Juste pour les avoir. Juste au cas où…
Et là, là, j’ai un soucis. Parce qu’il va m’en manquer un, de trousseau. Parce que bien que n’y vivant plus, je suis toujours officiellement locataire jusqu’au 31 décembre d’une sixième chambre bleue et blanche nichée sous les toits, avec les roucoulements des pigeons. Et que pour la première fois de ma vie, je viens de perdre les clefs de chez moi, de ce chez-moi qui ne l’est plus mais qui l’est encore pour quelques semaines. De ce chez-moi à moi. De ce refuge comme toujours temporaire entre deux errances, mais qui me donne encore le droit de me poser quelque part.
Et moi, madame, moi, je ne perds jamais rien. Jamais. Et les rares choses que j'ai perdu (2 t-shirts, un jean), je me demande encore des années plus tard où et comment j'ai bien pu les perdre...
Et là, cette histoire de clefs, et avec tous ces antécédents préalablement exposés, j’avoue, je ne sais qu’en penser. |
| posted by Lisbeï @ 11/30/2006 06:00:00 PM ::
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| novembre 15, 2006 |
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Il y a ce sommeil écrasant qui me surprend depuis plusieurs nuits à des horaires de poulailler, dès le livre ouvert et les pieds réchauffé par la douceur de la couette et de la bouillotte à 37°C. Un sommeil de plomb, sans rêves, sans trêves et sans errances. Un sommeil qui me laisse fraîche à défaut de dispose, et qui m’octroie même le luxe d’un quart d’heure le matin consacré à siroter un café en tête à tête avec la première cigarette plutôt qu’à me transformer en recordwoman du monde toutes catégories du levée-douchée-habillée-maquillée-coiffée-cassée-àlabourrequandmême (12’32, record à battre).
Il y a le plaisir du dehors à l’heure du déjeuner, à déambuler entre les travées du marché local le poitrail à l’air et le manteau débraillé.
Il y a ces montagnes de lessives qui n’en finissent pas de s’accumuler, de ne pas sécher et de se ré-accumuler, transformant les lieux exigus en Sicile perpétuelle.
Il y a cette façon a lui de ne rien dire mais de tout faire, ses attentions, toutes ses attentions pour tous ces petits détails du quotidien qui visent à me rendre la transition plus lisse, la vie plus douce . Il y a toute la tendresse de ses gestes, de ses yeux, de ses sourires et même de ses silences, tous ces égards alors que c’est sa vie même que je suis en train de squatter.
Il y a tous mes atermoiements, ces valses-hésitations entre mes envies de dehors, mes envies de vie égocentriques et ma culpabilité de ne pas être à la hauteur de tous ces moments dont il me gâte tant. Il y a ce rythme à trouver, et ce quotidien à recréer, moi pour qui le nouveaux trajet maison/gagne-pain est encore source de découvertes.
Il y a ces presque-conversations téléphoniques avec mon ex-colocataire qui me le font presque manquer, nous qui nous sommes croisés pendant 4 ans en ayant si peu de choses à échanger.
Il y a mon chez moi de fille qui est encore chez moi pour quelques semaines, et auquel il va falloir que je rendre bientôt visite pour cause d’étourderie / d’acte manqué. Mais c’est un mausolée vers lequel je vais devoir me hisser tout au long des 111 marches, un mausolée haussmanien résonnant de vide et de froid. Pas tout à fait achevé, mais agonisant. Sinistre, de devoir administrer l’extrême onction.
Il y a ce sentiment bizarre que me procure la déambulation sur talons, et que je redécouvre après presque 2 ans sur coussins d’air : il suffit que je sois sur 6 cm de talons pour éprouver un sentiment de pouvoir, de force et de domination absolu. Ne manque plus que le fouet, et j’en arrive presque à croire que la dem ‘, je vais avoir la force de la claquer pour de bon. Même si ce n’est que dans la tête, que c’est bon de faire 180 cm et non 159… Juste, il faudra que mes 10 orteils désarticulés réapprennent à tenir le choc…
Il y a le plaisir de retrouver la trace de Joshua, et celle de Mafaïka et d’Albinoal… Et de ne pas comprendre comment j’ai pu ne pas les chercher plus tôt…
Il y a mon caisson de basses réglé au millimètre et mes haut-parleurs à réinstaller d’urgence, pour de nouveau virevolter/vibrer avec mes 25 MoGo de mp3…
Il y a peut-être et surtout une réponse positive à donner, sur le fond et sur la forme :
- « Salut Lisbeï, ça va ? »
- « Oui. Oui, pour une fois, ça va. Je crois même que ça va bien. » |
| posted by Lisbeï @ 11/15/2006 05:41:00 PM ::
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| novembre 14, 2006 |
| Alive and Unpacking |
Toujours de ce monde...
Juste, pas le temps là tout de suite là maintenant... |
| posted by Lisbeï @ 11/14/2006 04:26:00 PM ::
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