Lisbeï
Grand tripotage de nombril et autres divagations
juin 17, 2003
Tous minables
(moi compris)


En relisant mon post précédent, je me rends compte que ça doit vous (vous ? plutôt « te », 3 lecteurs au non-compteur, non ? :-) ) paraître bien futile, ces histoires de fringues et de kilos. Limite minable, même.
Et bien, ça l’est, minable, et c’est vous, vous et votre regard dégradant qui me réduisez et réduisez l’existence de milliers de gens à cette minabilité. Je pleure comme une pimbêche vaine et puérile sur mes 15 kilos de trop, et je n’ose même pas mettre des chiffres sur ces kilos. Parce que même sur ce blog ou je me force à oser tout écrire, ces détails là, je n’arrive pas, parce que votre regard m’a gravé dans le crâne que faire plus de 55 kg, c’est MAL (admirez une fois de plus l’esquive).

Parce que ma mère a vécu le même calvaire dans sa jeunesse et en est restée tellement paralysée de complexes, qu’elle n’a jamais réussit à me tendre la main et à m’aider.

Parce qu’à l’âge de 15 en vacances chez de lointains cousins, le cousin en question m’apprend qu’il a reçut la consigne de ne pas parler avec moi « de cochon, de gros ou de choses sales, parce que comme elle est grosse, il ne faut pas faire d'allusions».

Parce que, toujours vers le même âge, je suis restée enfermée dans ma chambre pendant 6 mois complets, tellement j’étais persuadée que j’étais un monstre, que si je sortais on allait me jeter des pierres et que je ne méritais même pas l’air que je respire.

Parce que les mecs, dont le cerveau se résume à une bite même chez les plus civilisés, allaient draguer les connes avec un p’tit cul plutôt que moi avec mon cerveau mais mon gros cul. Tu comprends, ç’est pas bon pour l’image de marque une minette avec un gros cul.

Parce que vous avez tous réussi à me faire me haïr moi-même tellement fort, que je suis incapable d’aimer qui que ce soit, et que je méprise ceux qui m’aime, car s‘ils aiment une grosse comme moi, c’est qu’ils sont dégénérés, minables et pas normaux.

Parce que quand je vais acheter des fringues et que je demande un 44 (c’était la taille de Marilyn Monroe, pour info), les vendeuses me disent d’un air mi-méprisant mi-apitoyé qu’ils ne font pas les « grandes tailles » .

Parce que même la personne que j’aime le plus au monde et qui m’aime le plus au monde, mon frère (1.85 m, 65 kilos, allez comprendre la génétique), réussit à me dire que si je suis grosse c’est de ma faute, c’est parce que je le mérite car je ne fais pas d’efforts, et que quelque part c’est bien fait pour ma gueule.

Parce que j’en viens moi-même, jubilatoirement et j’en ai honte, à me réjouir des 25 kilos de trop d’une ex-rivale.

Parce que quand je fini par débouler chez un médecin au bord de l’hystérie en lui disant « faites quelque chose, je suis obèse et je vais mourir », elle me regarde avec de grands yeux en me disant « si vous êtes obèse, moi je suis Bill Gates ».

Parce que même moi, dans les moments de mauvaise humeur (je sais, je sais, ils sont nombreux) j’invective de reproche et de mépris dans ma tête ce gros ou cette grosse qui déborde du strapontin du métro, qui bloque les escaliers ou qui ose mettre un tee-shirt moulant en me disant « comment tu as a fait pour te laisser aller à ce point là, c’est bien fait pour ta gueule, salle grosse ». Non, non, ne jouez pas les mijauré(e)s, vous l’avez tous pensé aussi à un moment ou à un autre!

Parce que manger devient un calvaire, parce que quoi que vous mangiez (des haricots verts : « tiens, une grosse au régime… de toute façon, elle y arrivera pas », des frites : « c’est ça, empiffre toi ma grosse), c’est MAL, et si vous ne mangez pas, bah, comme tout être humain, vous êtes malades (seule exception, la dépression nerveuse).

Minable, parce que vous ne voyez pas la souffrance absolue, la solitude, le sentiment d’échec et de rejet permanent devant l’impossibilité d’être considérée comme « normale » par les autres, vous ! Parce que vous ne voyez pas que manger est le seul plaisir que vous avez bien voulu laisser à ces personnes, et que ce plaisir unique les fait grossir parce que justement elles n’ont que lui … et elles sont de plus en plus grosses et donc de plus en plus malheureuses… et elles grossissent d’autant plus ! Cercle infernal bouclé, bravo, merci les autres ! L’autre versant sont les personnes qui finissent par tirer leur plaisir de leur non-plaisir, qui se punissent par là où ils ont pêché… et qui ne mangent plus… et qui se laissent mourir de faim… Ca, c’est l’anorexie.

Les deux faces de la même pièce…

Tout ça pour dire que si je vous fais chier avec mes histoires de fringues et de kilos, et bien c’est de votre faute à vous !! C’est vous (entre autres, je sais) qui me rendez malheureuse comme une pierre depuis toutes ces années parce que vous êtes incapable de tolérance et de respect pour les excommuniés, à savoir les "exclus de la communauté". Car oui, on exclut les gros. On ne les fringue pas, on rend leur alimentation un chemin de croix permanent, on ne les baise pas (heureusement que je n’ai pas les 2 seins dans le même bonnet de soutien-gorge), et on ne les embauche pas, « parce qu’un gros dans la boite, ça fait tache » (véridique d’une copine en RH).

Une grosse, c'est sympa, c'est jovial, c'est fûté, ça arrange toujours les coups des autres, c'est la meilleure amie, la confidente... Mais à vos yeux à vous, la grosse est invisble, sauf pour gêner...

Donc, vous subirez des posts sur les fringues et sur les kilos, et nous nous vautrerons tous dans notre minabilité.

Merci de n’avoir pas lu jusqu’au bout.

Un peu de gentillesse, de tolérance et de paix, que diable… N’alimentez plus cette haine de soi-même (si, si, y’a bien 2 voire 3 sens).

Ah, ça va mieux en le disant.
Et non, je ne suis pas parano…
Et si, je suis une gentille fille, sur le fond…

Bref.
posted by Lisbeï @ 6/17/2003 06:41:00 PM ::
1 Comments:
  • At 2:27 PM, Anonymous Anonyme said…

    "Parce que les mecs, dont le cerveau se résume à une bite même chez les plus civilisés, allaient draguer les connes avec un p’tit cul plutôt que moi avec mon cerveau mais mon gros cul. Tu comprends, ç’est pas bon pour l’image de marque une minette avec un gros cul. "
    Tel un teckel devant une levrette affolante, je fond pour la femme d'esprit.

     
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