Lisbeï
Grand tripotage de nombril et autres divagations
septembre 29, 2003
Ca va pas fort ma grande, n'est-ce-pas... Tu tournes en rond dans ta cage, cette maudite cage hantée de questions contradictoires et de réponses troubles... Tu te tapes la tête toute seule contre des murs bien trop solides pour toi... Comme d'autres, tu as tenté de t'enfermer dans ton joli sous-marin monoplace et autosuffisant... Tu as même soudé le sas... sans prendre le soin de garder le poste à soudure sous la main... Là, tu es échouée 20 000 lieues sous les mers, et tu regardes l'eau monter peu à peu le long des cloisons en te disant que tu es plus forte que toutes ces tonnes d'eau salée, et que tu as été assez intelligente pour étanchéifier le tout et qu'ils ne t'auront pas... ... Non, tu ne craquera pas, ton orgueil comme toujours sera le plus fort... Et puis en plus, tu les emm@rde tous, bien sûr... Tss, tss...

Tu crois tenir encore combien de temps avant que cet océan de flotte ne s'abatte définitivement sur toi? Hein, concrètement? Combien de semaines, combien de mois avant que tu ne finisses en vitamines pour crabe?
Tu as plusieurs solutions tu sais, c'est à toi de choisir... C'est toi seule qui creuse ta tombe... Tu peux laisser monter l'eau, lentement, inexorablement, te battre pour les dernières molécules d'oxygène... Et puis... Tu peux aussi sur-souder tes caissons étanches, je suis sûre que tu arriverai, c'est même sûrement le plus simple à faire... Mais ça va en réduire d'autant tes cm2... Et la pression finira aussi par avoir le dernier mot... Implosion et explosion... Tu peux aussi camper sur tes positions, te mettre la tête dans le sable et contempler tes orteils... Ca, tu sais faire, très bien même...

"soupir"...

Je ne suis pas sûre que tu ailles très loin ni très longtemps encore comme ça tu sais. Jour après jour, tu t'es forcée ici à démêler l'apparence du réel, tu as peu a peu perdu face, enlevé ton masque de titane, tu t'es peu à peu avoué à toi-même que non, en fait, ça ne va pas . Que tu es même un peu faiblarde en fait en ce moment. Voire même au 5e sous-sol, avec les amibes. Et que tu ne supportais plus de croiser ton propre regard de menteuse. Parce qu'aussi, on t'as conditionné pour nier. Toujours. Encore. Coûte que coûte. Jusqu'au bout. Nier. Non. Ton seul mode de fonctionnement.

Mais même ça, tu n'avais plus la force de le faire. Alors tu t'es appliqué à mettre des mots signifiants sur ces éclairs que lançaient tes yeux haineux, traqués, cernés, affamés. Toutes ces semaines, tu as lutté contre toi-même pour accepter, pour t'accepter toi-même telle que tu es. Perdue. Seule. Vide. Triste. Fuyante. Acculée. Au bord du gouffre. Comme un lion fou dans sa cage, à cracher dans toutes les mains tendues, seule à démolir ton radeau de la méduse parce que tu as balancé tout le monde par dessus bord, que tu tires à boulets rouges sur la SNSM qui veut te tirer de ce mauvais pas, et que peu à peu les planches se dérobent sous tes pieds...

Mais tu te rends compte qu'avouer, c'est aussi difficile et épuisant que de nier. Alors tu t'es laissée aller à la facilité de n'utiliser (presque) que des mots vides... Ne plus nier, mais ne plus avouer non plus... Perdue. Tu (t')es perdue. Peut-être encore plus qu'avant.

Ce coin de virtuel que tu concevais comme un lieu d'apaisement, de maïeutique de tourments, de divaguations et d'errances, cette pièce blanche et bleue elle aussi n'a fait qu'ajouter un boulet de plus au chapêlet qui cliquète déjà à chaque pensée... Tu aurais pu en faire un courant d'air frais, un hâvre de chaleur, de tendresse et de sérénité, tu n'en as fait qu'une annexe de tombeau personnel... Tss, tss... Il te fait mal ce coin de virtuel, parce que tu t'y vois encore pire que dans ton miroir. Mais tu ne peux pas le lui reprocher. Tu n'y vois que ce que tu y mets. Tu t'enterre toi-même en fait, ma grande... Pourtant, tu le sais comme moi... Tu es aussi sur le fond tellement autre que tout ça...

A une époque, on te disait passionnée... On te le dit encore, parfois... Tu aimais les livres qui t'apprenaient à penser différement, tu aimais les gens pour ce qu'ils étaient et non pas ce que tu souhaitais qu'ils soient, tes amis pouvaient compter sur toi, et toi aur eux, tu aimais la musique qui faisait frémir tant tes neurones que ta libido, tu croyais en la supériorité de la décision et de l'action sur l'acceptation des contingences, tu aimais les surprises, l'aventure et les trucs bizarres, tu aimais les défis, les conquêtes et les victoires, tu aimais sans crainte, sans peur et sans reproche, tu avais appris à dire "oui" sans avoir le sentiment qu'on allait t'abattre au prochain tournant... Tu avais aussi appris à être un peu moins butée, appris à écouter les autres et à les laisser faire aussi un peu... Tu avais appris à perdre, mais toujours pour mieux gagner la manche suivante, tu passais par le grenier si la porte restait close, you used never to take "no" for an answer (except to your own questions), tu poussais, tirais, entrainais, convainquais... Par dessus tout, tu riais... Tu avais même fini par apprendre à rire de toi-même :-)
Ca te semble loin, je sais, mais c'est pourtant si proche...

L'autre jour, un médecin t'as proposé de prendre des petites pilules pour dormir... Pour avoir moins mal aussi... Pour anesthésier un peu la bête... Pour la première fois de ta vie, ça t'a pris plus de 2 secondes pour refuser... Tu t'es presque même dit qu'en fin de compte, ça te ferait peut-être du bien... Avant que la peur de tourner zombie chimique ne reprenne le dessus... Tu as donc définitivement refusé... Parce que tu n'en es pas là. Et tu le sais. Parce ce que tu peux... si tu veux.

Tu veux? Sûrement. Mais tu ne pourras pas si tu ne tentes pas d'organiser le chaos, le flux et le reflux. Tu ne pourras pas si tu continue à appréhender ta vie et ton monde en termes de "guerre civile", de "mur", de "radeau", de "pression", de "négation", de "relations publiques" et de "vivement le déluge". Tu ne pourras pas si tu n'acceptes pas de devenir aussi un peu perméable à tout ça, si tu n'acceptes pas réconcilier la passionnée avec le 5e sous-sol... Faire front, bien sûr, mais avant tout t'allier à toi-même...

Alors voilà ce que je te propose. Ca va prendre du temps, de l'endurance, ça va sûrement faire mal parfois, un peu beaucoup. Il va te faloir réapprendre à réfléchir, à ressentir, à interagir avant de mordre... Mais concrètement, tu n'as plus beaucoup d'autres solutions, d'autant plus que le froid et le sombre arrivent tout juste, que l'hiver va être long et que c'est depuis toujours une épreuve pour toi que de traverser ce vide, même quand tu as le soleil en tête... Alors quand c'est les amibes que tu as en tête en septembre...

On va tenter la voie médiane. On va oublier les pilules qui font rire et les fenêtres du 6e étage. On va recommencer par le recommencement...

Ouvre les vannes, un petit peu... Laisse l'air trouver le chemin des balasts... Et laisse toi monter, laisse toi aller à flotter... Peu à peu... Chronique les petits bonheurs autant que les grands malheurs... Reprends tout à la base. Fixe toi des petits riens, et tiens les. Puis d'autres, puis d'autres... Petit à petit, petits riens par petits riens, chasse l'eau des balasts... Ca va être des choses bêtes tu sais. Mais tu verras que chose stupide après chose anecdotique, ça va te permettre de respirer un peu mieux... Non, non, pas de liste des 7 travaux d'Hecule, juste des choses communes, quotidiennes... On s'attaquera aux grandes choses quand tu sauras déjà profiter de l'alan des petites...

Voilà ma grande, maintenant, c'est à toi de décider et de me dire ce que tu penses de cette troisième voie, celle de l'unité... peut-être celle de la sérénité... Non, non, je ne te demande pas de réponse ce soir... Penses-y. Penses-y vraiment, prends le temps de le faire... Mais décide. Dans un sens ou dans un autre, mais décide. Une bonne fois pour toute. Tu ne peux pas continuer à agoniser éternellement...
posted by Lisbeï @ 9/29/2003 12:50:00 AM ::
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