janvier 28, 2005 |
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Je regarde cette gamine fondre en larmes à la question la plus simple, « comment vas-tu Julie ? ». Je regarde cette gamine un peu trop grosse, un peu trop silencieuse, un peu trop volubile… Je regarde cette gamine de 9 ans qui passerait allègrement pour 12, pataude, maladroite, avec déjà des petits bouts de seins dont elle ne sait que faire et un joli bidon tout rond de bébé potelé. Je regarde cette gamine que l’école ennuie, que l’école humilie… Je regarde cette gamine seule dans la cour de récré, parce que les autres enfants ne veulent pas jouer avec elle… Parce qu’elle est trop grosse, parce qu’elle frappe, parce qu’elle a tellement le sentiment de n’avoir rien qu’elle ne rate pas une occasion d’arracher le peu qu’elle trouve… Je regarde son regard à Julie, ce regard où on lit la terreur, la panique, la haine, le désespoir… Je regarde cette gamine qui sanglote de peur chez le psy, tellement elle redoute qu’on lui reproche encore quelque chose… Je regarde cette gamine flanquée de sa mère, complètement exténuée, subissant le conseil de discipline de son école, le jugement, et la condamnation des adultes… Et elle n’a que 9 ans…
Je regarde cette gamine et son grand frère de 11 ans, ce grand frère silencieux qui passe en arrière plan comme une ombre, silencieux, délaissé aussi, tellement la cadette prend tout le souci des parents, ce grand frère à la limite de l’autisme tellement il n’est pas là, tellement il ne veut pas être là et surtout ne rien voir, ce grand frère parfait, calme, aimant, mince, bon élève, ce grand frère qui s’exclut lui-même de sa famille… Surtout, ne pas dépasser, ne pas attirer l’attention …
Je regarde ces deux gamins. C'est la troisième fois que je passe par hasard une fin d’après-midi désœuvrée en leur compagnie, à re-re-regarder ce documentaire sur les mécanismes et les cercles vicieux de la violence… Peut-on encore parler de hasard quand ça fait trois fois… |
posted by Lisbeï @ 1/28/2005 06:24:00 PM ::
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